samedi 14 novembre 2015

#Paris -13 novembre 2015-




Selon Aristote les hommes sont des animaux grégaires politiques,
Seulement les hommes se différencient des animaux. Ils possèdent le langage.
Le Langage. C'est la pensée.
                     La Pensée. C'est la prise en compte du bien et du mal.
                                       C'est l'intelligence.
Le Langage. C'est la communication.
                     La Communication. C'est le partage entre différents hommes et différentes femmes.
                                                      Le Partage. C'est l'Amitié.
                                                                         L'Amitié. C'est l'Amour.
                                                                                         L'Amour. C'est l'entente.
                                                                                                          L'Entente.
                                                                                                                           C'est la Paix. 

Alors pourquoi la nature belligérante et amorale de l'homme prend-t-elle parfois le dessus ? Comment l'humanisme peut-il disparaître au profit de la barbarie ? Comment la réflexion raisonnable et naturelle peut-elle être remplacée par une croyance et une obéissance abusive ? Comment le monde, notre monde, peut-il être à la fois si humain et si inhumain ? 

Qui que nous soyons. Quelque soit nos croyances. Quelque soit notre origine. 
Nous possédons tous en nous une part plus importante d'humanité, de paix, d'amour. 
Ne la laissons pas disparaître au profit de la haine et de la violence.

lundi 13 juillet 2015

Interview: Alain Pochet - comédien / metteur en scène

Comment êtes-vous entré dans l’univers théâtral ?


J’ai eu la chance d’avoir une mère ayant pratiqué du théâtre dans un contexte amateur, donc déjà petit ça m’intriguait. Puis assez rapidement j’ai même intégré la troupe de ma mère pendant un an et le metteur en scène m’a dit que je devrais faire un conservatoire d’arrondissement. A  l’époque j’habitais en Belgique,  je suis arrivé il y a seize ou dix-sept ans en France.

Un artiste vous a-t-il marqué ?


Il y en a beaucoup. Michel Serrault par exemple. Comme beaucoup d’enfants j’ai adoré Louis de Funès évidemment. Il y a aussi Claude Rich ou Philippe Noiret. Je n’ai cité que des hommes, mais il y a aussi de très belles comédiennes comme Danielle Darrieux, Marie Christine Barrault ainsi que Geneviève Casile.              

Vous faites essentiellement du théâtre, mais avez-vous déjà pensé au cinéma par exemple ?


Je préfère nettement le théâtre, mais si demain je dois tourner je serais aussi ravi ! Mais il est vrai que le cinéma c’est complètement autre chose. La prise de risques au théâtre est tellement plus excitante. C’est Jean-Pierre Bacri qui a demandé à son père de tourner dans un de ses films alors qu’il n’était pas comédien et au montage on a fait en sorte qu’il soit le mieux possible, en prenant plusieurs prises. Alors qu’au théâtre il n’aurait jamais pu faire ça. Je connais des comédiens qui tournent actuellement et qui ne pourraient pas tenir une demi-heure sur scène. Quand vous entrez en scène c’est absolument incroyable, c’est un pari, vous y allez et vous n’avez pas le droit de vous planter. Enfin les applaudissements, le retour du public, c’est la plus belle récompense.

Lorsque vous faites des mises en scène pensez-vous à l’impact sur les spectateurs ?


Alors ça c’est autre chose ! Jusque-là, je vous parlais en tant que comédien. J’ai peu pratiqué la mise en scène dans un cadre professionnel, je la pratique surtout dans un cadre scolaire avec l’option théâtre au lycée Franklin que j’anime. C’est génial de mettre en scène une pièce avec des amateurs.
Ce que j’aime aussi c’est concevoir le décor car je ne peux pas imaginer une mise en scène sans avoir pensé celui-ci auparavant. Beaucoup d’auteurs ont une idée claire du décor donc j’essaie de respecter ça. Mais j’aime aussi prendre des risques. Il m’est arrivé de monter l’Avare où normalement tout se passe chez Harpagon et là j’ai voulu que tout ait lieu dans son jardin là où il cachait sa cassette. J’ai beaucoup aimé l’expérience de l’Avare car on a pris énormément de risques.

Comment le décor peut-il traduire l’histoire de la pièce ?


Alors prenons par exemple Le Père avec Robert Hirsch, une pièce racontant l’histoire d’un homme qui a l’Alzheimer et que l’on suit sur quelques mois de sa vie dans une maison spécialisée. Ce qui était extraordinaire c’était que le décor se transformait, la scénographe nous a permis d’être dans la tête du malade et je vous assure que cela était incroyable ! Avec les expériences que je viens de vivre je me dis qu’il faut absolument que les décors parlent aux spectateurs.

Que pensez-vous de la citation d’Antoine Vitez : « c’est avoir à jouer l’impossible qui  transforme la scène et le jeu de l’acteur »


Chaque année quand on monte une pièce dans le contexte amateur c’est toujours un défi pour les élèves. Pour l’un d’entre eux notamment ce fut vraiment difficile de jouer Harpagon, mais le résultat final fut extraordinaire.
Ça m’est aussi arrivé d’avoir un rôle assez difficile à interpréter dans une pièce de Jean D’Ormesson car je ne me suis pas entendu avec le metteur en scène. J’ai vraiment eu d’énormes difficultés à interpréter ce rôle car il ne m’aidait pas. J’ai alors fait intervenir un autre ami metteur en scène qui m’a coaché discrètement et là j’ai vraiment pu m’amuser.       
Mais c’est vrai que les prises de risques transforment les comédiens, l’évolution du personnage se joue dans celles-ci.

Pensez-vous que la scénographie a une grande importance dans une représentation ?


Dans mon option théâtre, les organisateurs savent très bien que je donne beaucoup d’importance à la scénographie. En effet, je pense que lorsque les comédiens sont bien habillés et qu’ils jouent dans un véritable décor avec de bons accessoires il se passe quelque chose ; la qualité les élève et je pense qu’une mauvaise scénographie peut écraser les comédiens.

Mettez-vous en place une véritable séparation entre la vie quotidienne et votre métier de comédien, comment abordez-vous une représentation ?


J’aime descendre une demi-heure avant le spectacle me balader dans le décor, toucher les accessoires, entendre les gens entrer dans la salle, me familiariser avec eux. Puis surtout me remettre dans le personnage. A un moment il faut se déconnecter de la réalité, repenser à l’enjeu de la pièce pour pouvoir véritablement se concentrer. 




dimanche 14 juin 2015

Bonnard au Musée d'Orsay !




Dates

Du 17 mars au 19 juillet 2015

Musée d'Orsay
1 rue de la légion d'Honneur Paris

Note







Cette rétrospective organisée thématiquement permet une découverte progressive et personnelle de l'oeuvre de Pierre Bonnard. On se laisse emporter par ce travail trouble des couleurs saturées  et superposées de manière étonnante. On se laisse surprendre par des figures vaporeuses laissant une impression de mouvement, d'expression, de sensation au spectateur. Ces œuvres intimistes, surtout à la fin de sa vie, mettent le spectateur en situation de voyeur tout en l'accueillant dans leur intimité.

Cette exposition se décompose en neuf thèmes répartis dans neuf salles. Cela permet de révéler peu à peu la vie et la personnalité de l'artiste à travers ses passions et ses sentiments les plus profonds et non pas à travers une évolution chronologique. La technique de Bonnard ne connaissant pas d'évolution radicale, une monographie n'aurait pas pu structurer véritablement l'exposition. 

Pierre Bonnard (1867-1947) ne peut être considéré comme un impressionniste. Ses compositions sont formées de nombreuses lignes caractérisant les peintures traditionnelles. Il souhaite qu'il y ai de la vie dans ses toiles, une vie hors du temps, contrairement à Monet. Pour cela, il utilise des couleurs pures s’apparentant ainsi à Matisse et aux fauvistes. De plus, il ne souhaite pas copier la nature, il ne veut pas que le sujet s'impose à lui, il s'oppose alors à de nombreux impressionnistes.  Seulement, il n'est pas reconnu par Picasso qui affirme au contraire qu'"il obéit à la nature". Ainsi, comme l'affirme Matisse : "il reste incertain à quel bord il appartient".

Cette rétrospective nous permet donc de découvrir l'oeuvre de Bonnard à travers sa vision joyeuse et flamboyante tout en apprenant l'origine de ses influences, qu'elles soient artistiques ou personnelles. 

Un "Nabi très japonard"

On apprend tout d'abord qu'il est influencé par les estampes japonaises et prend comme modèle Gauguin. De fait, dans les années 1890 son style est décoratif, il utilise des lignes en arabesques, des couleurs vives et retire toute profondeur à la toile; le tout réalisé sur un format vertical rappelant les kakémonos japonais. C'est pourquoi il était surnommé le "Nabi très japonard" par Felix Fénéon (critique d'art).

Femmes au jardin (quatre panneaux décoratifs) 1890-1891
/

Faire jaillir l'imprévu

Les toiles de Bonnard sont réalisées à partir du souvenirs des sensations qu'il a éprouvé. Il réalise ses œuvres en atelier à partir de ses souvenirs propres, telle la description de la madeleine par Proust. C'est pourquoi ses tableaux nous donne à contempler une vision du monde personnalisée par la subjectivité de l'artiste. On découvre alors un monde redéfini grâce au regard original de Bonnard qui nous détache de la monotonie morne du quotidien et lui rend sa beauté singulière. 

Femme assoupie sur un lit, dit aussi L'Indolente, 1899

Intérieurs 

A travers la représentation de la vie contemporaine, Bonnard joue sur le thème de l'intimité. En effet, les intérieurs renvoient à des situations psychologiques ou sentimentales singulières. On entre véritablement au sein de ces compositions, comme si nous ouvrions une porte et tombions par hasard sur cette jeune femme nue. Nous sommes projetés dans l'intimité du peintre. 

La cheminée, 1917

Histoire d'eau

Nombreuses sont les toiles de Bonnard représentant une figure féminine érotisée dans un intérieur intimiste. Cette surreprésentation de l'idéal féminin est due à la passion de Bonnard pour deux femmes avant de décider de se marier à Marthe, provoquant le suicide de sa maîtresse. Ainsi un grand nombre d’œuvres représentant une figure nue nous fait redécouvrir le corps féminin ressaisi par une technique propre à Bonnard.  

http://passeurdarts.com/pierre-bonnard-exposition-musee-orsay/

Portraits choisis

Cette capacité qu'à Bonnard à donner vie à une simple pièce, à une simple situation quotidienne, se retrouve dans ses portraits. Il parvient à laisser transparaître la personnalité du modèle à travers le rythme des touches colorées donnant vie à la peinture. Dans le tableau Thadée Natanson et Misia, Bonnard parvient à communiquer une certaine tension et une certain trouble en opposant ces deux figures dans la composition ainsi que dans le traitement des couleurs. 

Thadée Natanson et Misia

L'Arcadie

Finalement Bonnard se projette dans une thématique mythologique à la fin de sa vie avec des toiles colossales. Il se détache du naturalisme et laisse la nature envahir ses compositions tout en libérant les figures humaines qui semblent presque rajoutées au paysage. Les couleurs palpitantes rythmant la végétation en créant une discontinuité spatiale prennent le pas sur la représentation centrale de figures humaines. Bonnard se détache finalement de la réalité pour atteindre une vision paradisiaque du monde autour du lui dans une célébration de la réconciliation de la nature et de ce monde redéfini.

La terrasse à Vernonnet


jeudi 11 juin 2015

Interview: Annette Douay - Restauratrice

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?


Je suis Annette Douay, je suis à la base restauratrice de tableaux. J’ai été formé il y a trente ans en Italie parce qu’à l’époque il n’existait pas de formation en France. Je fais partie de ce qu’on appelle la première génération des restaurateurs diplômés dans le cadre d’études professionnelles de restaurateur car avant moi il n’y avait pas de véritable formation. C’était une formation artisanale, de père en fils ou sur le tas. Aujourd’hui je suis aussi responsable de la formation professionnelle de ATP formation (une formation diplômante) et expert en authenticité des œuvres d’art avec une spécialité des tableaux. Enfin, Je travaille dans un atelier de restauration qui est aussi un centre de formation professionnel diplômant.

atelier du temps passé

Comment réalisez-vous la restauration d’un tableau de manière générale ?


C’est un métier qui est vraiment multidisciplinaire. Il faut à la fois avoir des connaissances théoriques et des capacités de maitrise technique, mais également des connaissances en histoire de l’art et être très méthodique, il faut surtout ne pas être créatif, car on ne créé rien et nous sommes contraints par une déontologie professionnelle. La première chose que l’on fait lorsque l’on nous confie un tableau c’est l’observer, faire le constat d’état, soit l’identification de tous les matériaux constitutifs et leur état de conservation. On va essayer de comprendre l’origine de l’altération. Ensuite on va pouvoir faire un projet d‘intervention, on va éventuellement pouvoir mettre en place des tests qui vont nous permettre de voir quel type de technique ou matériau utiliser. On avance petit à petit jusqu’à un résultat dit satisfaisant, ça se rapproche beaucoup d’une étude médicale. La conservation-restauration de tableau c’est en général de la restauration de peinture sur un support, mais il y a différents types de peinture, ça peut être une peinture à l’œuf, une peinture à la colle, une peinture à l’huile … le tout sur différents supports, cela peut être du papier, du carton, de la toile, du bois … Vous voyez qu’on a une diversité très importante et encore je ne vous ai parlé que des deux parties visibles. Entre la peinture et la toile il y a plein de couches invisibles, un tableau c’est un peu comme un millefeuille et une autre partie de notre travail est de percevoir l’état des couches intermédiaires pour savoir d’où vient le problème. On commence vraiment par ouvrir un dossier d’enquête, puis une fois qu’on connait mieux notre patient on va pouvoir dire que pour tel problème on va pouvoir utiliser telle technique. Cela va du plus simple, comme le bichonnage, au plus compliqué, où l’on va passer des mois, voire des années, de maturation, d’expérimentation pour essayer de trouver la solution la plus adaptée.


Avec qui travaillez-vous ?


On travaille pour le public ou le privé. Soit ce sont des particuliers qui possèdent des tableaux après les avoir achetés ou hérités. Soit ce sont des institutions, comme le monument historique, des ministères, des musées et là ce sont en général des appels d’offre avec toutes les lourdeurs administratives.

Comment expliqueriez-vous l’histoire de la peinture à l’huile ?


La peinture à l’huile est officiellement née en 1432. Deux artistes flamands, les frères Van Eyck, Jan et Hubert, ont eu l’idée d’utiliser l’huile mélangée avec des pigments pour essayer de faire une peinture. Avant eux, les peintures c’étaient essentiellement des mélanges d’œuf ou de colle, c’est ce qu’on appelait les peintures a tempera, ça sèche vite, c’est mâte et ça implique un travail de juxtaposition car l’on ne peut superposer les couches. La révolution qu’a apporté l’huile c’est que, dorénavant, la peinture sèche lentement, cela peut prendre 30 à 70 ans, mais surtout Jan et Hubert ont réussi à rendre l’huile siccative, c’est-à-dire séchante. En passant par des expérimentations, parce que les peintres à l’époque étaient des chimistes, ils ont ajouté des sels de plomb, des siccatifs permettant à l’huile de sécher, au moins en surface. Cela va alors permettre de superposer des glacis transparents pour donner l’illusion de la réalité. C’était une vraie révolution à l’époque, les peintres de tout l’occident sont venus voir leur premier tableau l’Agneau mystique. Donc on va dire que ça a commencé en 1432 et que ça n’a pas fini, mais en tout cas il y a eu une autre révolution en 1945-1950 avec l’apparition de la peinture acrylique.

L'Agneau Mystique, frères Van Eyck

La peinture à l’huile se conserve-t-elle mieux par rapports aux autres ?


Alors, il faut savoir l’utiliser. C’est beaucoup plus beau mais ça n’est pas facile. Ce n’est pas seulement du à la peinture, c’est aussi les sous-couches, la préparation, les encollages, le support, tout ça sont des matériaux organiques qui sont sensibles à l’environnement ; les vieillissements sont donc liés à la technique du peintre.

A partir de quand ne pouvez-vous plus intervenir sur une œuvre ?


Une œuvre lorsqu’elle est très altérée, on va simplement dire que l’on peut la conserver. C’est-à-dire qu’on va intervenir pour éviter qu’elle se dégrade d’avantage. En France on est conservateur-restaurateur et ça subdivise plusieurs parties dans notre métier. Il y a ce qu’on appelle la restauration conservative, quand on va traiter de la cohésion des matériaux. Puis il y a la restauration esthétique qui ne va traiter que l’image. Aujourd’hui d’autres parties se sont ajoutées, on a la restauration curative plus chimique qui traite tout ce qui est champignons, ensuite plus récemment il y a la conservation préventive pour prévenir les dégâts avant qu’ils n’apparaissent, elle concerne essentiellement l’art contemporain qui est un vrai problème. En effet, tout est destiné à se dégradé et pour l’art contemporain on n’a pas de solution étant donné que la plupart du temps il s’agit de matériaux atypiques.

Il s’agit donc d’un métier très récent celui de restaurateur ?


Oui, en termes de métier à part entière il est apparu dans les années 1980. Le grand changement c’est l’arrivée de la physique-chimie dans notre connaissance car maintenant on comprend d’où vient le problème et comment intervenir. De plus auparavant il n’y avait pas de déontologie. Aujourd’hui tout ce qu’on fait doit être stable et réversible, c’est-à-dire plus fragile que l’original pour pouvoir l’enlever un jour sans abîmer l’original, ça c’est le principal.

Est-il possible que la surcharge de vernis, due à diverses restaurations, puisse détériorer la couleur de la peinture ?


Oui, c’est le cas de L’Atelier du peintre de Courbet au musée d’Orsay où pour la première fois en France la restauration est publique. Effectivement, les différents traitements ont engendré une superposition de vernis. En règle générale on restaure les tableaux une fois par siècle au niveau du conservatif et peut-être une fois tous les vingt ou trente ans au niveau esthétique, c’est-à-dire que l’on met une nouvelle couche de vernis. Mais à un moment ces vernis vont s’oxyder, alors le tableau sera tellement bruni qu’on ne le verra plus, donc là on va intervenir pour retirer ces vernis.
Au cours du dévernissage de L’Atelier du peintre, ils se sont aperçus que les problèmes qui apparaissent provenaient en fait du support, donc la semaine dernière ils ont décroché le tableau pour travailler le revers … Il n’y a jamais de certitude dans notre métier, c’est ça qui est bien.

L'Atelier du peintre, Courbet

Comment qualifieriez-vous votre métier ?


C’est un métier où on apprend tout le temps, où on se remet toujours en question. En ce moment moi-même je suis deux formations différentes. Une avec une personne italienne qui travaille avec de nombreux produits comme ceux que vous voyez derrière vous (cf. photo). On travaille sur des solvants-gels qui n’existent pas encore en France. Puis j’ai une autre formation la semaine prochaine à l’institution nationale du patrimoine sur une nouvelle molécule. Donc tous les ans il y a de nouvelles techniques qui apparaissent et d’autres qui s’avèrent mauvaises. La technologie évolue beaucoup et ça permet d’abandonner les techniques qui étaient préjudiciables.


N’avez-vous jamais eu envie de créer ?


Alors non car les restaurateurs ne sont pas des artistes et les artistes ne sont pas des restaurateurs. Il ne faut pas avoir besoin de créer. L’artiste lui il a besoin de créer, c’est plus fort que lui. Nous on est technicien, observateur, c’est extrêmement vaste, mais on n’est jamais dans la création et il ne faut jamais en avoir envie ou besoin sinon on n’est pas fait pour être restaurateur.

Avant de décider de devenir restauratrice maîtrisiez-vous déjà le dessin ?



Quand j’étais petite je passais mon temps à dessiner. On m’avait inscrit aux beaux-arts car on disait que j’avais du talent. Mais je n’avais jamais eu envie de créer. Je reproduisais des choses, mais créer c’est très difficile. C’est comme un écrivain qui est devant sa page blanche. On doit avoir des compétences techniques et une sensibilité artistique mais il ne faut pas avoir ce besoin de créer pour être restaurateur. 




Retrouvez des informations complémentaires sur le site de l'Atelier du temps passé !


mardi 9 juin 2015

De Giotto à Caravage




Dates

Du 27 mars au 20 juillet 2015

Musée Jacquemart-André
158 boulevard Haussmann 75008 Paris

Note (/4)






Roberto Longhi, historien de l'art italien, a étudié principalement des artistes de la renaissance italienne et c'est à travers son regard que l'on découvre les œuvres de divers peintres italiens du XIVe siècle au XVIe siècle. La réunion de ces toiles permet de noter l'évolution de la peinture italienne au centre de la scène artistique depuis le début de la Renaissance au trecento, en se concentrant notamment sur la figure emblématique du Caravage. 

Dès l'entrée de l'exposition, après avoir passé un tripode comme dans le métro, nous sommes directement plongés dans la splendeur du maître baroque Le Caravage. Mon regard a été directement attiré par Le garçon mordu par un lézard. Son regard nous fixe directement et nous transmet la surprise mêlée de douleur qu'il ressent à cet instant précis. Ce n'est qu'après la rencontre avec se regard que l'on remarque un petit lézard ayant capturé dans sa gueule le doigt de ce jeune homme. La souffrance amplifiée par l'étonnement est visible à travers la contorsion du corps accentué par un jeu de clair-obscur touchant directement au point que je sentis presque son malaise. Celui-ci transparaît de même dans son visage, un sourcil abaissé, les lèvres entrouvertes, l'ombre accentuant le froncement des sourcils ... Caravage parvient à transmettre une véritable émotion à travers sa peinture.   

Le Caravage, Le garçon mordu par un lézard, 1594

De fait, même lorsqu'il choisit un sujet religieux tel qu'un épisode de la passion, Le Caravage parvient à lui donner vie, il ne retranscrit pas seulement le récit de la bible mais lui donne une profondeur singulière permettant d'atteindre le spectateur. Dans Le couronnement d'épines, la diagonale lumineuse réalise un jeu d'ombre dramatisant la toile en lui donnant une profondeur étant donné que le clair-obscur met en avant les gestes de torture des soldats ainsi que la ligne du coup du Christ affaissée soulignant sa douleur. 


Le Caravage, Le couronnement d'épines,1602-1604

Le spectateur est ainsi plongé directement dans les scènes intimistes choisies par Le Caravage où l'action se focalise seulement sur certains personnages permettant de rendre une émotion palpable se détachant ainsi de ses pères. 

En effet, une section consacrée au trecento et au quattrocento permet à l’œil du spectateur de repérer la singularité du Caravage par rapport à ses ancêtres. Même si Giotto marque une rupture dans la peinture en abandonnant l'idéalisation et en établissant une nouvelle expression picturale empreinte de naturalisme et d'humanité, il permet de lancer les peintres sur la voie de la modernité chacun ajoutant sa propre touche. Cette rupture avec la peinture traditionnelle se fait encore plus ressentir au quattrocento avec le peintre Masaccio qui, en s'inspirant des innovations précédentes établies par exemple par Brunelleschi ou Donatello, arrive à une expression plus humaine et intègre directement le personnage au paysage. C'est lui qui influencera notamment Masolino au point qu'il abandonnera le gothique international pour adopter une technique presque similaire à celle de Masaccio. Parallèlement Pierro della Francesca développe la perspective géométrique et atteint une technique quasiment parfaite mais inapte à l'émotion. 

Giotto di Bondone, Saint Jean l’évangéliste, vers 1320
Masaccio, Vierge à l'enfant, 1426-1427


Pierro della Francesca, Saint Jérôme avec un dévot
Comme l'affirme Roberto Longhi: "Caravage est donc en germe, un impressionniste, mais dans un registre dramatique"
Le Caravage influence de nombreux artistes nommés les caravagesques, même si plus formalistes ils tendent vers la scène de genre. Une diversité de courants étudiés par Roberto Longhi naissent donc à partir de ce dernier. Par exemple, Carlo Saraceni dans son oeuvre Judith avec la tête d'Holopherne parvient à rendre une atmosphère de mystère et de non-dit à l'aide d'une dramatisation de la scène grâce à un jeu de lumière tout en ajoutant une coloration douce et romantique. Malgré son regard mesquin, la féminité de Judith transparaît à travers la délicatesse de ses traits parvenant aussi à tromper le spectateur sur ses intentions criminelles. 


Carlo Saraceni, Judith avec la tête d'Holopherne, vers 1618
Bartolomeo Manfredi, Le couronnement d'épines, vers 1615

Une belle exposition faisant découvrir de façon simple et clair l'évolution de la peinture italienne lors de la Renaissance du trencento et quattrocento à travers Le Caravage introduisant une émotion qui nous touche encore aujourd'hui, nous, spectateurs du XXIe siècle. 



lundi 8 juin 2015

Interview d'Aude de Beyssac : sculpteur

Bonjour Aude, pour commencer pourriez-vous vous présenter en quelques mots ? 


Je m'appelle Aude de Beyssac, j'ai 47 ans, je suis sculpteur depuis quinze ans. Au départ je n'étais pas sculpteur, mais professeure d'espagnol. Pour moi la sculpture était un loisir que j'ai toujours pratiqué depuis l'âge de cinq ans. Puis, j'ai eu l'occasion de prendre un congé parental en 1998 lors de la naissance de mon troisième enfant et je me suis lancée, c'était l'occasion pour moi de changer de profession. J'ai mis deux ans environ à mettre en place la première expo en 2000 et à commencer à travailler avec un fondeur. Cette expo a bien marché et de fil en aiguille ça m'a mis le pied à l'étriller puis après les trois ans du congé parental j'ai démissionné de l'éducation nationale pour me lancer. C'est un loisir qui s'est transformé en métier de façon naturelle. J'adorais l'enseignement, être avec des ados, même si parfois cela pouvait être très dur, mais cette idée de terre me travaillais et les choses se sont enchaînées me permettant de me consacrer entièrement à ma passion. Mais finalement la boucle est bouclée étant donné que depuis 2004 je donne des cours de sculpture. C'est donc un parcours qui retrouve tout de même une cohérence. 

Qu'est-ce qui vous séduit particulièrement dans la sculpture ? 


C'est très dur comme question ... Je pense que c'est la rencontre avec le matériau. J'ai commencé à travailler la terre lorsque j'avais cinq ou six ans, j'ai toujours été dedans et j'adorais ça ! Mais pourquoi le volume ? Je pense que les choses se mettent en place avec sa sensibilité propre. Les choses ne se font pas complètement par hasard, puis après c'est le retour des gens qui compte. On me dit souvent que ce que je fais a beaucoup de douceur, d'humanité, de sensibilité; on me dit souvent que c'est une sculpture de femme. Et j'aime les choses qui sont fines, abouties. La terre c'est un matériau qui me correspond car il est très doux, très sensuel, il permet beaucoup de finesse et de sensibilité. On peut aussi travailler la couleur avec la patine. Puis on compose véritablement le travail, on met véritablement en scène. Mes sculptures sont souvent présentées dans des cadres car j'aime beaucoup le modelé avec un personnage, une attitude ... souvent quand je travaille sur la danse avec le mouvement on a souvent besoin d'appuis. Je fais donc des cadres très tendus, lisses et géométriques, ça permet aussi de moderniser pas mal les pièces. 


Quel artiste vous a le plus influencé ?


Je pense qu'il s'agit de l'ensemble des artistes du XIXe et XXe, en particulier Rodin ou Camille Claudel. Ce sont les premiers a avoir inventé le mouvement en sculpture. Chez Rodin on voit que c'est une sculpture d'homme, tandis que chez Camille Claudel il y a beaucoup plus de sensibilité; je pense que ce sont des sculpteurs qui ont changé vraiment la vision que l'on a du volume. Une des premières sculptures que j'ai faite quand j'avais environ quatorze ans c'était une reproduction de La petite châtelaine de Camille Claudel. 

Rodin, Le penseur
Camille Claudel, La petite châtelaine 

Exercez-vous d'autres formes artistiques ? 


Non, je me consacre pleinement à la terre et à la sculpture.

Comment réalisez-vous une sculpture ? Quelle est votre démarche ? 


C'est variable, j'observe beaucoup l'attitude des gens. Ce que je fais est figuratif et ce qui m'intéresse c'est étudier la façon dont on est soit, la façon de se tenir, une attitude particulière; je trouve que ça révèle énormément la personnalité. Ce qui m'intéresse c'est une sculpture qui est assez sensible, elle doit révéler soit une émotion, soit un état d'esprit, quelque chose qui se passe à l'intérieur ... un regard, quelque chose qui dévoile ce qu'on pense, ce qu'on ressent. L'émotion, le sentiment, l'amour, l'amitié ça a du sens, car l'on n'est pas seulement un corps, mais on a un corps et une âme, et je trouve que l'âme transparaît à travers le corps. C'est pour ça que je reste figurative, c'est l'âme humaine qui m'intéresse. Ça suffit à être le point de départ d'une sculpture après la terre s'anime autour. 

Donc vous partez principalement d'une idée et non d'une photo ou d'un modèle particulier ? 


Ça dépend des fois. Sur une photo, une attitude va m'évoquer quelque chose que je vais alors ressentir, il s'agit d'exprimer l'émotion à travers la terre. Parfois j'ai une idée précise que je ne parvient pas à rendre en sculpture, on a donc parfois des ratés. Il se peut que l'idée qu'on a eu ne rende pas en volume et il faut l'accepter. Il y a des périodes où tout va bien et d'autres où tout est moche. Mais les périodes de doute et de raté amènent une évolution. 

Pour vous la sculpture est terminée dès la cuisson de la terre ou faut-il qu'elle soit fondue en bronze? 


Tous mes originaux sont cuits et patinés, je les met en scène, je vais au bout du projet et c'est là que je vois si vraiment ça me plaît ou pas. Tandis  qu'un bronze est une réplique de la pièce originale dont on est un peu dépossédée car il y a un travail extérieur d'un artisan et il faut accepter qu'une personne extérieure travaille sur votre projet. Je ne peux pas dire que je préfère les originaux, mais il dégage autre chose. C'est tout de même mon original qui compte et non pas le bronze. Le bronze apporte quelque chose de particulier car il accroche la lumière différemment, mais la pièce vous échappe un peu. 

Réalisez-vous vos sculptures par rapport à un spectateur potentiel ? 


Je pense qu'il ne faut surtout pas penser à ce que la sculpture va donner, car on rentre dans une démarche commerciale et il faut faire exactement ce que l'on a envie de faire comme on l'aime. Après si ça rencontre un public c'est très bien, sinon tant pis. Mais je pense que si l'on réfléchit par rapport à l'appréciation du public, on y perd son âme. Ce qui fait la valeur de son travail c'est le fait qu'il est unique car réalisé par une seule personne.

Mise à part la valeur commerciale, il y a beaucoup d'artistes qui souhaitent faire passer un message à travers leurs œuvres. 


Je ne veux pas utiliser l'art pour dénoncer ce qui est dur dans le monde, je pense que la vie est déjà assez dure comme ça, la vie est faite de grandes joies et de grandes difficultés, c'est lourd. Je pense qu'on en a suffisamment sur les épaules. Au contraire le plus grand compliment qu'on puisse me faire, c'est un client qui rentre chez lui et qui me dit que lorsqu'il voit ma sculpture il est apaisé, que ça lui fait du bien. C'est sûr qu'il y a beaucoup d'artistes qui ont une démarche de dénonciation. Surtout à l'heure actuelle, l'art n'est devenu que message, on ne s'intéresse plus au beau, on dénonce quelque chose. Pour moi c'est une forme d'art, mais je trouve qu'on a un peu détourné le mot art car l'esthétisme est a la base de celui-ci. Mais ça n'est pas une critique, même si je pense que tous ces artistes là, qui cousent des biftecks pour faire une robe afin de dénoncer la société de consommation, vis-à-vis de gens comme moi estiment que je fais de l'artisanat. Je pense que c'est la même différence qu'il y avait autrefois entre art et artisanat. Je pense que cette différence là existe toujours et tous ces artistes qui travaillent des concepts ne mettent pas sur le même plan ceux qui travaillent directement la terre, le matériau, même s'il y a de la place pour tout le monde. Aujourd'hui il y a deux formes d'art parallèles qui ne se côtoient plus. De plus, la spéculation a changé beaucoup de chose, le développement du marché de l'art a contribué à l'évolution de son statut. 

Voilà quelques photos pour découvrir l'oeuvre de Aude :



dimanche 7 juin 2015

Weather Festival vu par Vic !






Vendredi 5 juin


Une programmation de haut niveau pour tous les gouts : scènes printemps et été plutôt blooming face à des scènes automne et hiver plus darks, ainsi qu’une scène ambient expérimentale. Le plus dur, c’est de choisir. Qui voir ? Quelle ambiance ?
Un Q.G. pour ma part, en hiver : Len Faki nous a emmené loin avec une techno berlinoise métallique alors qu’à côté, en automne, Ben Klock annonçait déjà la folie berlinoise qui se concrétiserait le lendemain avec SA venue (cf. Samedi 6 juin, Marcel Dettmann). Et The Driver aka Manu le Malin nous a boosté pour le reste de la journée avec un set d’une puissance électrique qui a su nous faire raver jusqu’à 7h (et non pas 8h comme prévu … trop de bruit dixit les voisins des alentours !). Et c’est bien de cela que l’on a eu : du BRUIT ! Mais pas n’importe lequel, du bon. Parce que OUI, on peut aller au Weather Festival pour la musique, et pas pour autre chose. Pouvoir se payer le luxe d’avoir des DJs, parmi les meilleurs au monde, se déplacer, l’espace de quelques heures pour leur set, à Vincennes pour nous faire vivre certains des plus beaux moments de notre vie nocturne.



Samedi 6 juin


C’était décidé d’avance, je devais arriver plus tôt que la veille (0h30) pour danser sur le set de Zadig et d’Abdulla Rashim en hiver (19h-22h). Mes amis ne s’étant pas réveillés à temps, c’est seule, entourée de milliers d’inconnus, que j’ai pu commencer la soirée avec un super set où l’on sentait que les DJs se faisaient plaisir en nous faisant plaisir : un techno lourde qui n’a pas eu peur de nous faire trembler. C’est l’avantage d’écouter ces sets en live : le son est toujours plus fort, et ce n’est pas simplement que dans nos têtes que ça résonne mais bien dans l’ensemble de notre corps. Ricardo Villalobos en automne a quant à lui su satisfaire notre soif (mes amis étant arrivés entre temps !) de sensations toujours plus fortes. Mais c’est surtout la tête d’affiche de la soirée qui ne m’a pas déçu : Marcel Dettmann. Marcel. Dettmann. Une légende pour tous ceux qui aiment la techno berlinoise et qui comme moi, rêvent d’aller l’écouter chez lui, au Berghain. Et donc, comme on ne pouvait pas aller au Berghain, le Berghain est venu à nous… Un set époustouflant où chaque morceau nous envoyait des décharges de bonheur, relançant de plus belle l’hystérie générale. Enfin, un festival qui s’est terminé, toujours en hiver, avec Collabs 3000 composé de Speedy J et Chris Liebing qui ont su nous donner l’énergie nécessaire pour danser jusqu‘à 8h du mat, chaque beat faisant l’effet d’un électrochoc qui permettait de relancer la machine (en l’occurrence, un corps douloureux de courbatures après plus de 20h de danse sur l’ensemble du festival).



Une première expérience de festival techno qui nous a laissé des étoiles plein les yeux, des souvenirs mémorables et de belles ampoules aux pieds …

Alors oui, certes, on n’a pas pu tout voir et tout écouter, heureusement pour vous et moi, Arte a filmé une bonne partie du festival que l’on peut revoir aux adresses suivantes :

Continuez de rÂver. 


-écrit par VIC-